Qu'aller chercher l'hiver, 400 km au nord du cercle polaire, dans une région montagneuse et sans habitants ? Les neiges arctiques, les lumières du Nord et le vent des sommets. Nous eûmes tout cela, et un peu plus, de la Finlande.
Préparés à l'hiver des montagnes arctiques, nous nous confrontâmes avec surprise au printemps de Kilpisjarvi : brutal, venté, mais modéré, avec des températures proches de zéro aux meilleurs moments, sous un soleil bas ; et s'abaissant vers -20 °C en ressenti, sous le vent ou par temps clair souffle coupé.
Tous les itinéraires non balisés étaient ouverts à notre exploration contemplative, traversant lacs et frontières de la Norvège, au fil de notre fantaisie. Plusieurs petits sommets nous furent offerts. Nous les prîmes avec humilité et avec le sentiment de la précarité du temps, dans le silence de notre isolement. L'observation de la nature, sans bulletin météo ni téléphone, prenait une intensité anachronique. Par un temps juste mauvais, l'itinéraire n'aurait pas dépassé le bûcher ou les toilettes sèches, autant de jours que nécessaire...
Des sommets, nous pûmes admirer une partie des montagnes alpines de Fennoscandie (Sarek, Kebnekaise, jusqu'aux aux littoraux norvégiens coupés de fjords). Et puis, vers le Nord et l'Est, contempler les montagnes rondes, peu élevées, émergeant de la taïga, que les Sâmes finlandais appellent Tunturis et qui sont le domaine de la toundra.
La nuit est le royaume de la lumière. Il est singulier d'observer pour la première fois une aurore dans de tels refuges de la nuit hyperboréale, quand sous d'innombrables étoiles dansent les premières flammes...
Au bord du lac de Pitsusjarvi, dans une nuit extraordinaire, nous fûmes au coeur d'une sorte de voûte, au centre de laquelle convergeaient des piliers de lumière avec, à son sommet, un trou béant et noir. Le Cid avait dû voir ici « cette obscure clarté qui tombe des étoiles » en marchant doucement sur de la neige meringuée.
A Kilpisjarvi, c'est sous une éclaircie, dans la tempête, que nous observâmes les lumières du Nord, dans une sorte de jubilation congelée. Ce fut le deuxième voyage, pour certains le quatrième, qui permit d'observer des splendeurs jusque-là invisibles.
Pas vache, la Finlande nous offrit également l'éclipse de soleil à 94 %. Mais équipés de notre seule surprise, nous observâmes essentiellement les observateurs, dans un pub rempli de trophées de chasse et de cartes murales du pôle Nord. Nous prîmes encore notre part de sauna, de kotta, d'anecdotes et quelques bières griffées d'un ours blanc.
Stéphane Viciana
photos : Anne-Marie et Christian Genillier, Peggy Vogt.
http://www.monalbum.fr/Album=QOZQCXZ3
Je remercie tous les acteurs de cette excursion qui ont fait de moi le simple passager d'une belle organisation collective. Je remercie également Jean Fabbi qui m'a emmené là-haut la première fois et tous ceux qui en convaincront d'autres, qu'il n'y a pas si loin de la coupe aux lèvres.